POESIE VERTICALE, Roberto Juarroz - poésie
Les saisons nous façonnent, les variations météorologiques s'imposent à nous et nous invitent à consentir aux ciels offerts. L'été nous a gâtés, nous en avons tous soupiré de soulagement, puis d'aise!
La rentrée approche et les ciels francs et le soleil sont toujours là. Juste, un rien de vif, d'humide dans l'air du matin, des brumes qui tardent à se lever au dessus des eaux nous préparent doucement à la prochaine saison. Et c'est presque encore un soupir d'aise, comme une envie d'humus, d'odeur de pommes, une petite envie d'être triste même tiens.
Alors un peu de poésie pour accompagner cette envie de recueillement, pour préparer les saisons intérieures à venir. Un peu de poésie qui ne correspond à aucune actualité, pour changer.
Le Seuil propose dans sa collection de poche "Poésie Points" un choix de poèmes du poète argentin Roberto Juarroz, considéré comme l'une des voix les plus singulières et les plus importantes de la poésie sud-américaine du XXe siècle.
C'est une poésie qui dérange nos certitudes et trouble par ses interrogations répétées. Une poésie dont Julio Cortazar a écrit: "Il y a longtemps que je n'avais pas lu de poèmes qui m'exténuent et m'exaltent comme ceux-ci ", et Philippe Jaccottet: " Dès les premiers vers, on entend une voix autre, décidée, tranchante et rigoureuse. "
Voici quelques liens pour prolonger votre lecture, suivis d'extraits pour vous mettre en bouche...
http://www.franceculture.fr/emission-poeme-du-jour-avec-la-comedie-francaise-poesie-verticale-45-2013-05-16
http://www.maulpoix.net/juarroz.htm
http://www.jose-corti.fr/auteursiberiques/juarroz-roberto.html
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Comment aimer l'imparfait
si l'on écoute au travers des choses
comme le parfait nous appelle ?
Comment parvenir à suivre
dans la chute ou l'échec des choses
la trace de ce qui ne tombe ni n'échoue ?
Peut-être nous faudrait-il apprendre que l'imparfait
est une autre forme de la perfection :
la forme que la perfection assume
pour pouvoir être aimée. (VI, 7)
// p.112
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Le ciel n'est plus une espérance,
mais seulement une expectative.
L'enfer n'est plus une condamnation,
mais seulement un vide.
Désormais l'homme ne se sauve ni ne se perd :
simplement parfois il chante dans le chemin. (VI, 102)
// p. 139
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Tu es mon plus complet abandon,
mon immunité, ma zone franche,
ce qui m'exempte de prendre soin de moi.
C'est pour cela peut-être qu'en toi s'unissent
mon souvenir extrême et mon extrême oubli
et je ne sais si tu es ma compagnie
ou si tu es déjà ma solitude. (VI, 94)
// p. 137
Nathalie